Cycle « Histoires de familles bilingues »
Je voudrais vous raconter l’histoire d’une famille bilingue que j’accompagne (dans le cadre de mon travail) et qui m’a beaucoup touchée. Elle est très particulière car, même si le point d’entrée est la question du bilinguisme, elle nous mène au delà de la langue, à travers la relation parent-enfant.
Alejandra (d’origine espagnole) vit en France avec son mari français et leur fils Daniel*. Depuis la naissance de Daniel Alejandra lui parle en espagnol. Au début, pendant qu’elle le gardait à la maison, son fils lui répondait en espagnol (et en français à son père). Cependant, dès qu’il intégra l’école maternelle, il passa progressivement à « tout français ». Alejandra continua à lui parler en espagnol en espérant que le comportement de Daniel changeât. Il n’y a que lors des séjours en Espagne qu’Alejandra entendait son fils parler espagnol avec ses grands-parents et d’autres enfants là-bas. Mais jamais avec elle.
Parler la langue, mais pas avec elle…
Alejandra me contacta quand Daniel avait 8 ans, en octobre dernier. Elle apprit qu’il était particulièrement actif à l’école en cours d’espagnol et qu’il se débrouillait très bien. L’enseignante l’informa qu’il discutait même en espagnol avec un camarade d’origine colombienne. Alejandra était partagée. D’un côté, le fait que son fils maîtrisait sa langue la remplit de joie. De l’autre, elle était triste que son fils ne voulût pas parler avec elle en espagnol, mais il le faisait avec d’autres personnes.
Nous commençâmes notre collaboration. L’objectif était de comprendre les points de blocage, les effacer et changer les habitudes linguistiques de Daniel. La première étape était la plus difficile. Mais tout comportement a sa raison et nous y arrivâmes. Grâce à l’écoute active et au travail qu’Alejandra décida de réaliser sur sa relation avec Daniel. A travers des observations, des questionnements et des jeux de rôles. Entre temps, Alejandra découvrit la sensibilité de Daniel que le garçon n’avait pas l’habitude de montrer.
Vers une relation « particulière » avec sa maman
La seconde étape s’avéra moins compliquée que nous y attendions. Au fond, Daniel souhaitait avoir cette relation « particulière » avec sa maman, possible grâce à une langue à eux, mais il ne savait pas comment l’exprimer. Nous sommes nombreux à connaître une sorte de gêne pour parler une autre langue à quelqu’un avec qui nous avons toujours communiqué dans une langue bien définie. Chez les enfants, heureusement ceci est moins marqué. Avec un pacte « signé » entre Alejandra et Daniel, en quelques semaines les contacts entre eux changèrent. Bien évidemment, le français ne disparut pas complétement des conversations d’Alejandra et Daniel, mais l’espagnol prit progressivement de plus en plus de place.
Le travail ne s’arrête jamais
Le travail continue. Avec des bases différentes et plus d’écoute réciproque au sein de la famille. Alejandra me tient au courant, elle souhaita faire des points avec moi tous les six mois, pour ne pas se sentir seule.
C’est une des expériences qui me toucha le plus dans mon travail avec les familles bilingues. Peut-être parce qu’il s’agissait de quelque chose de plus que de parler la langue du parent… ?
Si vous aussi, vous avez besoin de soutien, parlons-en. Envoyez-moi un message à anna(at)bilingual-kid.com pour voir ensemble comment nous pourrons aider votre enfant à parler votre langue maternelle grâce au programme d’accompagnement personnalisé que j’ai créé pour les familles bilingues.
*Les prénoms et la langue ont été changés. Et la photo ne présente pas Alejandra et Daniel.
Si vous souhaitez partager avec nous votre réflexion, je vous invite à le faire dans les commentaires de l’article.