période critique

La question de la période critique chez les enfants bilingues / multilingues apparaît souvent chez les familles qui m’écrivent. Est-ce qu’il n’est pas encore trop tard ? Et si je commençais maintenant ? Tout d’abord, il n’est jamais trop tard, on peut apprendre des langues à tout âge, y compris pour devenir bilingue. Cette question renvoie au bilinguisme précoce, développé dans l’enfance. Il existe plusieurs théories concernant la période critique pour acquérir sa seconde langue : avant 7 ans, 11 ans, avant la puberté… Les linguistes ne sont pas unanimes, certainement parce qu’il n’y a pas assez d’études à ce sujet et les échantillons ne sont pas représentatifs. Cependant, je voudrais partager avec vous une analyse qui me paraît particulièrement juste et qui apporte des éléments de réponse à cette question.

Nouvelles attitudes

Claude Hagège, linguiste français, situe le début de la période critique d’apprentissage de langues minoritaires / familiales / secondes à l’âge de 11 ans. A partir de là, des changements importants s’opèrent chez l’enfant. L’intérêt pour l’apprentissage devient secondaire, laissant la place à tout ce qui concerne l’enfant lui-même : son développement physique et psychique. 

Les jeux verbaux et les découvertes linguistiques deviennent moins intéressants. En même temps, l’enfant a tendance à être plus réservé dans l’expression de ses émotions et ses sentiments, surtout vis-à-vis de ses parents. Il cherche son autonomie, ayant besoin de s’affirmer. Ces distances avec les parents l’éloignent obligatoirement de la source principale de sa langue minoritaire.

Avis des autres

Pendant que les parents deviennent un peu moins présents, les copains commencent à prendre de plus en plus de place. Mais la situation se complexifie car l’enfant (bientôt l’adolescent) attache maintenant beaucoup d’importance à son image aux yeux de ses amis. Chaque critique est ressentie avec plus de force qu’auparavant. Les erreurs sont perçues comme impardonnables, ce qui génère une crainte de ne pas être à la hauteur et la peur du ridicule. Ceci explique la réticence à parler ou perfectionner la langue que l’enfant ne maîtrise pas suffisamment. D’autant plus que l’envie de ne pas se distinguer de ses amis, enlève à la seconde langue le charme qu’elle a pu avoir avant.

Contre les risques de la période critique

Voilà la position de Claude Hagège que je trouve intéressante et pertinente. Cependant, il ne faut pas oublier que le début de la période critique n’est pas fixé à 11 ans chez tous les enfants. Selon le rythme du développement de l’enfant, il peut arriver plus tôt ou plus tard. La personnalité de l’enfant détermine également la façon dont il vivra cette période, chaque enfant étant différent et unique.

Et comment s’armer contre la période critique ? Enraciner nos langues maternelles chez nos enfants avant. Plus tôt l’enfant crée un lien fort avec notre langue, notre culture… plus facilement ce lien survivra ces périodes complexes et intenses dans la vie des enfants.

  • Si vous avez déjà commencé, continuez ! Intensifiez les moments dans votre langue, rendez-les uniques, encore plus riches et pleins d’émotions.
  • Si vous avez l’impression de piétiner, changez de stratégie, essayez de faire différemment. Il n’y a pas une seule méthode de faire, mais peut-être la vôtre a besoin d’être optimisée.

Quelles que soient vos difficultés ou hésitations, je vous propose de vous soutenir dans vos efforts. Parlons-en. Réservez un RDV en visio offert (ou envoyez-moi un mail : anna (at) bilingual-kid.com) et je vous expliquerai comment nous pourrons travailler ensemble. Ensuite, vous déciderez.

Source : Claude Hagège « L’enfant aux deux langues », Editions Odile Jacob, Paris, 1996

Si vous souhaitez partager avec nous votre réflexion, je vous invite à le faire dans les commentaires de l’article.